Quelle est la meilleure approche pour mener à bien mon projet technologique selon mon contexte d'affaires ?
La réussite d’un projet technologique repose autant sur le choix de la méthode que sur la solution livrée. Dans un contexte d’affaires où l’incertitude grandit et où les parties prenantes n’ont pas toujours la même vision, il devient essentiel de sélectionner la bonne approche, prédictive ou adaptative, au bon moment.
La matrice de complexité de Stacey fournit justement le cadre d’analyse qui permet de prendre cette décision de façon éclairée.
1. Comprendre la matrice de Stacey
Créée par Ralph D. Stacey dans les années 1990, la matrice évalue un projet selon deux axes :
Axe : Vertical
Description : Niveau d’accord entre les parties prenantes, d’« près de l’accord » à « éloigné de l’accord ».
Axe : Horizontal
Description : Certitude technique, de « faible incertitude » à « forte incertitude ».
Le croisement de ces axes définit quatre zones :
Simple : accord élevé, certitude technique élevée.
Compliqué : accord élevé, certitude technique modérée.
Complexe : accord partiel, forte incertitude technique.
Chaotique : désaccord marqué et imprévisibilité extrême.
Image généré via ChatGPT 4o
2. Quand privilégier l’approche prédictive ?
2.1 Portrait de l’approche
Aussi appelée approche linéaire ou « waterfall », elle repose sur une planification détaillée et un enchaînement de phases séquentielles (analyse, conception, développement, essais, déploiement).
2.2 Conditions d’application
Cette approche est à privilégier lorsque :
Les objectifs et exigences sont clairement définis et acceptés.
Les technologies utilisées sont connues et maîtrisées.
L’environnement est stable et les changements sont rares.
Le budget et l’échéancier sont fixes.
Dans une approche prédictive, le cahier des charges joue un rôle central. Il doit comprendre :
Une description complète des fonctionnalités attendues
Des critères d’acceptation précis
Ce niveau de détail est fondamental pour valider rigoureusement, à la livraison, si une demande est :
Un correctif : la solution ne correspond pas à ce qui était prévu
Ou une demande de changement : un nouveau besoin qui sort du cadre initial
Cette distinction permet de maintenir le contrôle du périmètre, de bien gérer les ajustements et d’éviter les glissements d’objectifs.
2.3 Avantages concurrentiels
Prédictibilité des coûts et des délais
Documentation complète, utile à la maintenance et à la conformité
Standardisation des processus et des livrables
Maîtrise des risques grâce à des étapes formelle
Image générée avec ChatGPT 4o
3. Quand passer à l’approche adaptative ?
3.1 Portrait de l’approche
Qualifiée d’agile ou évolutive, cette méthode repose sur des itérations courtes, une implication continue des parties prenantes, et une capacité à s’adapter rapidement aux changements.
Elle permet d’avancer par jalons ou “milestones”, avec une feuille de route évolutive (roadmap). Chaque livraison devient une occasion de :
Tester des hypothèses
Valider les besoins avec les utilisateurs
Ajuster les priorités
Réorienter le développement
La planification devient un outil vivant, qui s’adapte au rythme du projet et non l’inverse. Il s’agit d’une stratégie qui vise à « concevoir, tester, apprendre et ajuster », maximisant ainsi la pertinence des livrables en fonction de la réalité du terrain.
3.2 Méthodologies itératives possibles
Plusieurs cadres s’inscrivent dans cette logique d’adaptation :
Scrum, Kanban, Lean Startup, gestion de produits
Design thinking (réflexion conceptuelle)
Conception centrée sur la personne
Pensée systémique
Tous partagent une philosophie commune : amélioration continue, collaboration active et intégration de la rétroaction réelle pour faire évoluer la solution.
3.3 Conditions d’application
L’approche adaptative est préférable quand :
Les besoins sont incertains, évolutifs ou émergents
L’environnement est instable ou très innovant
Il y a divergence entre les parties prenantes
Des phases d’expérimentation sont nécessaires
3.4 Avantages concurrentiels
Capacité d’adaptation rapide aux nouveaux besoins
Réduction des risques en validant fréquemment
Engagement renforcé des utilisateurs et des équipes
Favorise l’innovation dans des contextes complexes
Meilleure adéquation aux besoins des utilisateurs, grâce à l’apprentissage en continu
Expérimentation encadrée, appuyée par des prototypes et des données d’utilisation réelles
4. Poser le bon diagnostic en trois étapes
Mesurer le consensus
Les parties prenantes s’entendent-elles sur les objectifs et les moyens ?
Y a-t-il un alignement sur les priorités et les critères de succès ?
Évaluer la certitude technique
Les résultats sont-ils prévisibles ?
L’équipe connaît-elle les outils et technologies ?
Le projet est-il dans un environnement stable ou mouvant ?
Positionner le projet dans la matrice
Zone simple : planification linéaire, approche prédictive
Zone compliquée : planification rigoureuse avec l’expertise d’intervenants clés
Zone complexe : itérations courtes, validation fréquente
Zone chaotique : réaction rapide, stabilisation, puis adaptation
5. Conseils pratiques pour les PME
Bonne pratique : Réviser régulièrement la position du projet.
Pourquoi c’est utile : Le niveau de complexité peut évoluer.
Bonne pratique : Former vos équipes à reconnaître les zones de la matrice.
Pourquoi c’est utile : Pour éviter l’application inadéquate d’une méthode.
Bonne pratique : Mixer les approches si nécessaire.
Pourquoi c’est utile : Un projet peut commencer en mode adaptatif, puis passer en mode prédictif à mesure qu’il se stabilise.
Bonne pratique : Encourager la clarté documentaire, même en mode agile.
Pourquoi c’est utile : La rigueur peut coexister avec la flexibilité.
Conclusion : l’intelligence situationnelle comme levier stratégique
Dans un monde des affaires en constante mutation, la capacité à adapter votre approche de gestion de projet n’est plus un luxe — c’est un avantage concurrentiel.
La matrice de Stacey permet de sortir des réflexes rigides et de faire des choix éclairés, fondés sur la nature même de votre projet. Les organisations qui réussissent sont celles qui savent apprendre, s’adapter et ajuster. Et vous, dans quelle zone se situe votre prochain projet ?